Modeste rideau des jours et des nuits
Ce rideau “hebdomadaire” est l’aboutissement d’un travail de plusieurs années de recherche, de réflexions, d’assemblages, de modifications successives.
Le concept de rideau, déjà utilisé sur le thème des “passants” est ici au point de départ un souvenir d’enfance : les rideaux méditerranéens composés de petits éléments suspendus, nombreux, souples et mobiles, à travers lesquels on passe et repasse, on aperçoit ou on devine l’intérieur comme l’extérieur. Une séparation légère, jamais close, toujours animée d’un mouvement fluide, parfois même d’un bruissement discret, comme pour inviter à effectuer un nouveau passage.
Le thème évoqué est celui des sept jours de notre semaine :
En haut, les divinités et les planètes président et donnent leur nom aux jours : la Lune, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne et le jour solaire ou divin. Leurs symboles astronomiques les accompagnent.
On trouvera ensuite chaque jour un personnage qui effectue un passage, ouvre une voie ou accomplie un geste.
Plus haut ou plus bas seront présentés les couleurs des jours, rappel des sept couleurs de l’arc-en-ciel : violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé et rouge.
Un message quotidien maintenu par une pince pourra être changé à volonté.
Il en est de même pour les petits cadre-photos en cuivre, dont on pourra changer le contenu en écartant délicatement les verres protecteurs.
A la suite de ces éléments de « même famille », les objets ou créations vont se succéder, davantage diversifiés selon les heures et les évocations propres à chacunes de nos journées. Des symboles établis, on évoluera vers des univers quotidiens personnels, individuels, jusqu’aux heures nocturnes, laissant alors la place aux rêves, à l’irrationnel, à l’absurde peut-être.
En somme, à partir d’une présentation organisée et soigneusement mise en place, on évolue vers des éléments de plus en plus incongrus, inattendus, dont le sens est voilé.
Quant au titre lui-même, il rappelle la modestie matérielle des rideaux méditerranéens dont il est question plus haut, mais aussi la démarche du sculpteur, qui, surpris, se voit travailler progressivement avec des matériaux improbables (souvent très modestes, mais attachants) pour des finalités qui lui échappent !
A titre d’exemple, voici une brève présentation du mercredi : Mercure, le messager des dieux et protecteur des artisans, commerçants, voyageurs, médecins (et des voleurs ou des menteurs !), est ici représenté sous la forme de deux coureurs poursuivant des cadrans solaires.
Au-dessous est placé son symbole astronomique, puis le troisième jour biblique de la création.
Suivent : la couleur du jour, un bleu « fluide » avec la plume,
un bleu « stable » avec la plaque de métal.
Un personnage en bronze qui passe à travers un cercle en tenant une
chaine brisée.
Une pince qui tient un « message du jour » interchangeable, ici un morceau de soie parfumé (au 5 de Chanel !).
La clé fixée dans le cadenas évoque la menace ou le souvenir d’un vol (au sens large)
Le voyage sous toutes ses formes, représenté par quatre moyens de locomotion enfantins (jouets miniatures)
Les photos du jour à introduire entre les verres du cadre (recto-verso)
Une irruption inattendue : un « danseur à la corde » coiffé d’un coquillage, Jérôme Bosch n’est pas loin.
Le serpent du caducée de Mercure est ici devenu ressort, il soutient un trousseau de petites clés de mécanicien.
Un grimpeur tente de sortir de son anneau de rideau.
Enfin, un petit buste de physicien Henri Becquerel (en polyuréthane) est surmonté d’un cadran horaire à l’aiguille folle.
Une étiquette métallique des années trente conclut le mercredi sur un fragment de poême (Baudelaire) :
« Là, tout n’est qu’ordre et beauté »
2009, bronze, cuivre , laiton, matériaux divers, acier,
bois, tissus, papier, verre, plastique, éléments minéraux, végétaux, animaux…
chainettes de laiton, fil de laiton et fil d’acier pour relier les différentes parties
h. 230 x l. 90 x prof. 15